Travaux de 2022
The Favourite – Yórgos Lánthimos – 2018
Yórgos Lánthimos propose une vision moderne de l’aristocratie anglaise durant le siècle des Lumières, se focalisant sur la reine Anne, jouée par Olivia Colman. Le réalisateur use de plans fisheyes et de plans larges pour rendre compte de la grandeur et de la richesse des lieux, contrastants avec l’hystérie et le deuil de la reine Anne, de la vie luxueuse et finalement peu enrichissante intellectuellement qui se déroule au château.
La musique commence par une voix d’enfant, qui incarne les 17 enfants perdus de la reine, puis un accompagnement aux cordes avec un violoncelle sans vibrato pour accentuer le côté baroque. Il y a deux mouvements, la traversée du couloir en pleine déréalisation et le retour en fauteuil roulant. Le premier mouvement est lyrique, la mélodie est tenue au violoncelle, avec l’intervention d’un chœur d’enfants au passage du bébé. La fin de la scène se termine par un cluster de pizzicatos aux violons, descendants à mesure que la reine se laisse raccompagner dans sa chambre par sa servante.
The Walking Dead – Frank Darabont – 2010
Le générique de Walking Dead montre une version plutôt simplifiée par le dessin et le photo-montage de ce que représente la série en général. On a ici des hordes de zombies, des arbres et des corbeaux, des personnages à cheval et des tombes. En réalité la série est plut sanglante que ça, on a beaucoup de premier degré et le réalisme est glaçant.
La musique du générique présente une mélodie « ritournelle » assez atypique, revenant au demi-ton supérieur à chaque cadence, inlassablement, comme ces hordes de zombies. La musique démarre avec une basse électronique sautillante qui rappelle les cordeaux par le timbre, contrastant avec un jeu col legno syncopé aux violoncelles. Les cuivres et les vents modifiés sur logiciel ajoutent un aspect irréel et les voix chuchotées représentent une part de mystère, elles sont pensées pour incarner les zombies.
Still Alice – Richard Glatzer, Wash Westmoreland – 2014
Dans cet extrait, on voit une mère (atteinte d’alzheimer précoce) discuter avec sa fille de son avenir professionnel. Il y a dans ces scènes intimes une volonté de montrer les premiers déclins cognitifs de la mère, la lassitude du mari, et les premières réactions d’une fille heurtée dans son intimité.
La musique est inspirée par cette perte de mémoire, basée sur une mélodie plutôt lyrique avec des sauts d’octaves descendants. J’ai essayé d’exprimer au mieux cette perte d’information au travers de silences et d’effets de jeux du violon (pizzicato, tremolo, staccato, etc.) liés par des notes harmoniques aiguës. Ainsi, on se sent en accord avec la situation, avec les moments d’errance de cette mère qui fait de son mieux pour vivre avec sa maladie. On n’exagère pas plus le tragique qui se joue, mais on l’accompagne avec légèreté.